Les nombreuses plaintes à l’encontre de ce projet financé par l’un des plus grands groupes d’entreprises privées d’Inde – Reliance ADAG – incluent de graves violations des droits de l’homme, des expulsions forcées, des indemnisations plus qu’inadéquates, des actes d’intimidation des communautés affectées de la part de la police, des disparitions de manifestants, le transfert des ouvriers blessés hors du site du projet, la violation des obligations contractuelles à fournir des postes et installations pour les populations déplacées, des pratiques de travail non éthiques et inhumaines, une lourde pollution entraînée par l’activité du projet. Pour ne nommer que les plus graves.
La Banque Ex-Im des États-Unis a participé au financement de ce projet de 4 milliards de dollars US à raison de 900 millions de dollars. À la suite de visites sur site menées par une équipe internationale d’enquêteurs, une plainte a été déposée auprès du BIG pour que le projet soit inspecté correctement. La Banque Ex-Im des États-Unis a classé le projet Reliance-Sasan dans la catégorie « A », qui implique l’application des critères de performance de la Société financière internationale (critères de performance SFI). La SFI est une institution financière internationale faisant partie du groupe de la Banque mondiale et chargée de la bonne application des critères de performance aux projets d’investissement afin de gérer les risques et les impacts environnementaux et sociaux. Ces critères incluent des directives concernant notamment les impacts environnementaux et sociaux, la prévention de la pollution, les conditions de travail, la réhabilitation et la réinstallation des populations.
Au cours de la deuxième semaine du mois d’octobre 2014, une équipe de deux personnes provenant du BIG de la Banque Ex-Im des États-Unis s’est rendue sur le site du projet Sasan dans le district de Singrauli, dans l’état de Madhya Pradesh en Inde. Ce qui devait être une « inspection » ne fut rien de plus qu’une tragicomédie. D’autant plus que les communautés affectées attendaient avec impatience de pouvoir fournir leur point de vue sur la situation afin de soumettre leurs inquiétudes concernant ce projet MDP et dénoncer les graves impacts qu’elles subissent.
Les deux « inspecteurs » envoyés sur place n’ont cessé de modifier leurs plans et annuler les réunions prévues avec les personnes affectées. Ces changements n’ont été communiqués qu’à la dernière minute aux membres de la société civile chargés des relations et interactions avec les communautés affectées. Le parti pris des inspecteurs transparait clairement dans le rapport, qui mentionne leur intention de se rendre sur le site du projet à bord d’un hélicoptère mis à disposition par Reliance, la société « cliente » visée par les plaintes. Leur plan n’a échoué qu’à cause du mauvais temps.
Tout au long de l’inspection, les inspecteurs n’ont pas voulu prendre le temps d’entendre le principal activiste local – M. Awadhesh, les communautés affectées, ni même les jeunes femmes envoyées par les OSC pour traduire et faciliter les réunions. Les inspecteurs ont souvent, et grossièrement, empêché les représentants de la société civile et de la communauté locale à expliquer en détail leurs points de vue. Ils ont également refusé de rencontrer les communautés affectées dans leur localité, et se sont contentés de convoquer quelques représentants dans leur chambre d’hôtel pour discuter – ignorant totalement les pratiques éthiques et culturelles. C’était d’autant plus inquiétant que les hauts fonctionnaires de Reliance Power, la société cliente, étaient très nombreux à se trouver dans l’hôtel au même moment afin de repérer toute personne osant venir se plaindre. Les inspecteurs ont également déclaré qu’il n’était pas de leur devoir de prendre note de toutes ces violations étant donné que la Banque Ex-Im des États-Unis n’avait financé que l’achat des équipements auprès de sociétés américaines, et qu’ils sembleraient avoir été « influencés » s’ils acceptaient d’écouter les communautés affectées ! Ils ont par contre nié se trouver en présence de hauts fonctionnaires de la société cliente soumise à l’inspection. Aucun parti pris donc! Quelle comédie tragique.
Soumya Dutta – Coordinateur, Beyond Copenhagen collective
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